net.art generator. Solution : Piratage Social

Par Morgane Stricot, juin 2018.

net.art generator est un programme informatique qui collecte et recombine des ressources provenant de l’Internet pour créer un nouveau site web ou une nouvelle image. Il utilise une interface web qui demande à l’utilisateur d’entrer un titre qui sert ensuite de mot clef afin d’effectuer une recherche, et de saisir un nom en tant qu’artiste.

net.art generator est le résultat du projet “Female Extension”. Cornelia Sollfrank, l’artiste derrière cette œuvre, a créé 289 artistes féminines internationales pour concourir au Hamburger Kunsthalle Net art competition en 1997. En utilisant ce programme informatique qui recueille du HTML au hasard et le recombine automatiquement, Sollfrank a saturé la compétition avec des œuvres automatisées réalisées par des femmes virtuelles.

Depuis 1997, Cornelia Sollfrank a collaboré avec sept programmeurs avec qui elle a réalisé cinq versions différentes du générateur. Tous utilisent PERL, un langage de script jusqu’ici très stable et fiable. L’instabilité vient ici des moteurs de recherche connectés via leurs API.

Le dernier net.art generator est resté hors service pendant de nombreux mois : Google, le moteur de recherche connecté, a changé ses conditions d’utilisation en 2015 et a mis fin à l’accès gratuit et illimité à leurs résultats de recherche. L’accès gratuit est maintenant limité à 100 requêtes par jour.
Aux alentours de 9h ou 10h du matin, heure française, voici le message d’erreur écrit par Cornelia Sollfrank que l’on peut lire sur l’interface lorsqu’on essaie de générer une œuvre sur le site de net.art generator:
“Merci d’utiliser nag_05 ! Malheureusement, il semble que la limite de requêtes pour aujourd’hui soit déjà dépassée! En raison de la politique actuelle de Google, l’accès aux résultats de recherche est très limité pour les clients non payants comme c’est le cas pour ce merveilleux projet net.art (100 requêtes par jour) ! […] À long terme, nous cherchons à montrer à Google comment il peut soutenir l’art sur Internet d’une manière significative, mais il y a encore un long chemin à parcourir 😉 »

Ce message d’erreur avertit les utilisateurs sur les problèmes associés aux politiques de données et à leurs hégémonies. C’est un bon début mais pas suffisant pour Cornelia Sollfrank qui se sert de ce genre de dysfonctionnement comme fuel pour sa création. Cornelia Sollfrank, Winnie Soon et le programmeur berlinois Gerrit Bolez ont décidé de trouver une solution efficace. Ils ont développé une version du net.art generator qui fonctionne via un hack de Google. Ce projet toujours en cours est appelé « crowdapi ». Il s’agit de glaner des clés de développeurs auprès du public. Il sape ainsi les conditions d’utilisation limitatives en changeant automatiquement la clé d’authentification dès que les 100 requêtes sont atteintes. Cette « solution de piratage social » peut aider à réfléchir sur les relations de pouvoir entre les entreprises et les utilisateurs. En faisant don de leur clé API à Cornelia Sollfrank, les utilisateurs maintiendront activement l’œuvre d’art en vie.

Site Web : https://nag.iap.de/